Array ( [slug] => parcoursd [slugex] => la-maison-du-patrimoine-a-valence ) // Add the new slick-theme.css if you want the default styling Bibliothèque numérique patrimoniale
La Maison du Patrimoine à Valence grand format La Maison du Patrimoine à Valence

Une demeure du XVIe siècle

 

La Maison des Têtes de Valence, classée monument historique le 19 mai 1944 accueille depuis le début du mois de juin 2023, un nouvel espace ouvert au public : la maison du patrimoine de Pays d’art et d’histoire de Valence Romans Agglo. L’occasion pour nous de revenir sur l’histoire, la restauration, les habitants de cette demeure emblématique et de présenter ce nouvel espace dédié à l’architecture et au patrimoine.

Vers 1530, le sieur Antoine de Dorne construit son hôtel particulier, la futur Maison des Têtes, dans une des rues principales du Valence du Moyen-Âge. Ce valentinois de naissance est un homme puissant, docteur en droit, professeur de l’université de Valence, consul de la ville. Il est également fortuné, notamment par son mariage avec l’une des plus riches familles saunières (vendeur de sel) de Valence.

Médiathèque Latour Maubourg (cote : D29112(1)) Médiathèque Latour Maubourg (cote : D29112(1))

Erudit, ayant voyagé en Italie, il réorganise un édifice sur la base de structures existantes et aménage ainsi sa demeure selon une organisation classique au XVIe siècle, c’est-à-dire trois corps de logis autour d’une cour carrée, espace de circulation et puits de lumière. La façade sur la rue offre les éléments caractéristiques du Gothique flamboyant avec un jeu de courbes et de contre-courbes, de figures fantastiques rampantes et de motifs feuillagés courant sur des arcs en cloche.

Les médaillons

Antoine de Dorne fait également réaliser le décor des façades que nous connaissons aujourd’hui avec les médaillons et autres éléments qui ornent la cour d’honneur et le mur extérieur. Certains autres motifs accusent l’influence de la Renaissance italienne comme les neuf figures en médaillon du rez-de-chaussée qui portent des inscriptions renvoyant aux matières enseignées à l’époque de l’université de Valence où Antoine de Dorme, docteur en Droit était enseignant. Les inscriptions encore visibles sont « Virtus nobilitas », « Asclepios medicinum », « Moses theologos ».

Enfin, les quatre têtes joufflues, en haut de la façade représentent les vents : vent du sud pour les tempêtes de pluies à la fin de l’été, vent d’ouest pour les brises légères du printemps, vent de l’est pour les tempêtes de l’automne et vent du nord pour le souffle froid de l’hiver. En franchissant le seuil de cette demeure, nous accédons au corridor et à la cour intérieure. C’est l’occasion de découvrir d’autres médaillons sculptés sur les murs, représentant cette fois des portraits d’empereurs romains, ils sont accompagnés de deux médaillons d’un homme et d’une femme, sans doute les propriétaires de la demeure. La cour intérieure abrite les bustes de saint-Augustin, saint Grégoire le Grand, saint Jérôme et saint Ambroise de Milan.

La restauration

La Maison des Têtes a été construite principalement avec de la molasse extraite des carrières de Châteauneuf-sur-Isère ou de Saint-Marcel. Cette pierre, très présente dans les constructions anciennes locales, est un gré friable très sensible à l’érosion et à la pollution. Sans une opération de sauvegarde, elle se désagrège. A la Maison des Têtes, plusieurs opérations de restauration ont eu lieu consistant soit à une consolidation superficielle par imprégnation d’un produit durcisseur, soit au « ragréage » qui consiste à purger la pierre de ses parties malades et à les remplacer par un mélange de pierre et de mortier, soit au remplacement total de la pierre par du grès des Vosges. Pour les zones les plus sensibles, il peut y avoir eu un nettoyage au laser. Des parties manquantes des moulures ou des sculptures ont pu être recréées.

Plusieurs campagnes de restauration ont été menées. La première à la fin des années 1960 a porté sur les grandes fenêtres de la façade, puis fin des années 1980 sur les façades de la cour intérieure, dans les années 1990 ce sont le corridor et les parties hautes et basses de la façade sur rue qui sont repris. Enfin en 2022 et 2023 un vaste projet a permis la rénovation, la restauration et l’aménagement de l’ensemble des intérieurs du rez-de-chaussée et de la partie sur rue du 1er étage.

Les propriétaires

La famille de Dorne

Le premier propriétaire de la Maison des Têtes est Antoine de Dorne. C’est lui qui construit la demeure telle que nous la connaissons aujourd’hui avec sa cour intérieure et ses arcades. C’est un professeur de droit de l’université de Valence, il exerce durant 35 ans, il meurt en 1551. La maison reste la propriété de cette famille de magistrats, conseillers au Parlement du Dauphiné durant trois générations. Le dernier héritier Fortunat meurt en 1583, il était alors le seul habitant de la demeure avec ses serviteurs, une cuisinière, un valet de chambre et un palefrenier.

Les Marquet

Le 12 septembre 1587, Jeanne de Dorne, la sœur de Fortunat épouse Barthélemy Marquet et apporte la Maison des Têtes en dot. Les Marquet, famille de militaires, deviennent ainsi propriétaire de père en fils de la demeure pour deux siècles, jusqu’à la Révolution où la maison est alors confisquée à Louis François de Marquet qui a émigré.

La librairie-imprimerie Aurel

Vendue pour 43 600 livres comme bien national le 21 mars 1794, la demeure est acquise par Madeleine Vernet, veuve du libraire Pierre Aurel. La Maison des Têtes permet alors d’agrandir sa librairie-imprimerie qui est transféré dans son rez-de-chaussée.

Médiathèque Latour-Maubourg (cote : D16776) Médiathèque Latour-Maubourg (cote : D16776)

C’est en 1789 que Pierre Aurel ouvre une imprimerie, la seconde de Valence. En 1790 il devient maître imprimeur. Il est installé au rez-de-chaussée des maisons Faure et Pellerin, à l’angle de la place des Clercs. C’est là qu’un simple lieutenant d’artillerie, Bonaparte, vient chaque jour travailler dans la bibliothèque du libraire et devient ami avec le propriétaire. Pierre Aurel fonde le 1er janvier 1793, le journal politique « La vérité du peuple ». Trente et un numéros paraissent de 1793 à 1797. Marié à Madeleine Vernet, ils ont cinq enfants. A sa mort suite à une maladie, le 23 septembre 1793, son 3eme fils Joseph Marc Emmanuel (13 janvier 1775 - 1834), imprimeur de l’armée, revient à Valence et reprends le commerce familial. En 1798, il suit Bonaparte en Egypte et devient l’imprimeur officiel de la campagne d’Egypte. Il reste dans ce pays jusqu’au 28 floréal an VIII. De retour à Valence, il fonde le 3 juin 1807, le « Journal de la Drôme ». A sa mort en 1834, ses fils reprennent l’imprimerie.

Tout au long du 19e siècle, la Maison des Têtes aura plusieurs propriétaires privés pour enfin être achetée par la ville de Valence en 1980.

Un visiteur illustre

Bonaparte, jeune lieutenant a logé à Valence quelques temps, non loin de la Maison des Têtes. Il fut l’ami des fils Marquet et des imprimeurs Aurel, père et fils. Nous pouvons donc supposer qu’il a souvent fréquenté la Maison des Têtes, c’est pourquoi aujourd’hui une salle lui est dédiée dans la maison du patrimoine.

Les salles de la maison du patrimoine

Valence Romans Agglo est labelisé depuis 2016 par le Ministère de la culture en tant que Pays d’art et d’histoire. Ce label engage, entre autres, la collectivité à concevoir un lieu de présentation, d’explication et de médiation de l’architecture et du paysage. L’opportunité de la restauration de la Maison des Têtes a permis d’engager ce projet pour la plaine de Valence, du Rhône au contrefort du Vercors. Un second lieu dédié à la Drôme des Collines sera ouvert à Romans dans la Maison du Mouton en 2024.

L’exposition permanente dédié aux paysages, matériaux et monuments permet de sensibiliser, d’informer et de former tous les publics au patrimoine. Elle présente quelques fac-similés des collections du fonds patrimonial de la médiathèque. Nous en avons sélectionné deux présentés ci-dessous.

Dédicace du graveur ardéchois Jean Chièze, dans l’ouvrage « Pantagruel » de François Rabelais. [Médiathèque Latour Maubourg, Valence, D30533] Dédicace du graveur ardéchois Jean Chièze, dans l’ouvrage « Pantagruel » de François Rabelais. [Médiathèque Latour Maubourg, Valence, D30533]

Jean Chièze a illustré cette édition du Pigeonnier datant de 1935 avec ses gravures sur bois. Dans ce dessin dédicacé on reconnait Pantagruel arrivant à Valence place des Clercs. Il vient pour étudier à l’Université, mais il rencontre des marroufles (canailles) qu’il arrive à faire fuir.

L’auteur de l’ouvrage Casimir Genest est un architecte et homme politique, conseiller municipal de Valence de 1892 à 1896 sous l’étiquette du Parti radical. Dans son livre il décrit avec humour la vie imaginaire d'un maire républicain de Valence. L’ouvrage est illustré de nombreux dessins et caricatures réalisés par Henriot. Beaucoup de ces caricatures représentent des personnalités valentinoises de l’époque, parmi eux, Ernest Tracol (Valence 1846-1914) architecte de plusieurs écoles valentinoises de la IIIe République.

Sources

Lacroix André, « La maison des têtes à Valence », dans Bulletin de la Société d’archéologie et de statistique de la Drôme, 1881-1882

Valence Ville d’art et d’histoire, « la maison des têtes », coll. Focus ville pays d’art et d’histoire, 2015, 14p.


D'autres parcours peuvent vous intéresser...

© 2018. Valence Romans Agglo
Valence agglo