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// Add the new slick-theme.css if you want the default stylingLe picodon est un fromage au lait cru de chèvre à pate molle blanche ou jaune, recouvert d’une croûte naturelle fleurie. Il a la forme d’un palet rond de 5 à 7 centimètres de diamètres pour 2 centimètres environ d’épaisseur. Faisant partie des 46 fromages français reconnus Appellation d’Origine Contrôlée, il obtient ce label en 1983 sous l’appellation « Picodon de l’Ardèche et Picodon de la Drôme » avant de devenir AOP en 2009. Aujourd’hui, 140 producteurs produisent plus de 456 tonnes de picodon grâce à quelque 18 000 chèvres. Son aire de production s’étend donc sur toute l’Ardèche et toute la Drôme mais également sur le canton de Barjac dans le Gard et le canton de Valréas dans le Vaucluse faisant ainsi du picodon, un fromage emblématique du sud-est de la France. Pour autant, son origine demeure toujours incertaine voire mystérieuse.
En effet, le nom même du picodon reste aujourd’hui sujet à débat : il pourrait provenir du patois provençal picaoudou, signifiant « petit fromage piquant » ou encore de l’occitan pichot, « petit ». Il apparait dans les sources sous de multiples orthographes comme picaudou, picaïdon ou encore picaudon. Les écrits historiques à son sujet sont relativement rares jusqu’au XIXe siècle notamment parce que le picodon s’ancre dans une tradition rurale, orale et populaire. Nous pouvons néanmoins faire remonter les premières traces écrites de ce fromage au XIVe siècle vers Dieulefit, Valréas ou encore Tournon, sans avoir l’exacte certitude qu’il s’agisse bien du picodon actuel mais assurément d’un fromage de chèvre. Le poète de la Pléiade Pierre de Ronsard en aurait dégusté dans sa jeunesse au château de Tournon au XVIe siècle.
Ci-dessus : Chastan C., Mannent R., Le Picodon, un fromage dans les étoiles. Histoire et histoires d’une passion dans l’Ardèche et dans la Drôme, Syndicat du Picodon, 2003.
Produit par des femmes, réservé à une consommation familiale, le picodon était fabriqué pour être reversé comme redevance en nature de la plupart des baux fermiers. Il permettait aussi en automne et en hiver, lorsque la production laitière des chèvres se faisait plus rare, d’éviter les pertes d’excédents de lait. Sa production apparaît intimement liée à l’histoire de l’élevage caprin où la présence de la chèvre était nécessaire pour assurer la subsistance des familles pauvres dans les montagnes vivaraises ou préalpines. Il faut attendre la fin du XIXe siècle pour que ce fromage prenne un véritable essor commercial notamment grâce au « Petit Train du Picodon » entre Dieulefit et Montélimar. Cette ligne de train relia Dieulefit à Montélimar de 1893 à 1936, facilitant l’importation de charbon et d’engrais mais aussi l’exportation de céramiques, de textiles et marchandises alimentaires comme le picodon dont la vente se répandit sur les marchés locaux de la Drôme. Cette ligne de train fut inaugurée par Emile Loubet, futur Président de la République, qui ne cachait par ailleurs pas son affection pour le picodon. Il ira, entre autres, plaider au Conseil municipal de Paris pour que ce fromage sec trouve sa place aux côtés de fromages frais qui eux ne payaient pas de droits d’entrée dans la capitale.
C’est aussi à cette époque que le picodon fait son entrée dans le dictionnaire Le Littré en 1883 sous la définition suivante : « nom d'un fromage estimé qui se fabrique dans le Drome [sic] » alors qu’il continue d’être loué dans les traditions populaires notamment dans des comptines en occitan ou en français. Enfin, en 1933, le célèbre « prince des gastronomes » Curnonsky lui donne une place de choix dans son Trésor gastronomique de France. Le classement du picodon parmi les fromages AOC, au début des années 1980, vient couronner cette notoriété en apportant à la fois reconnaissance et protection de ce fromage séculaire.