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La Drôme et l’Ardèche sont, sans conteste, deux destinations savoureuses. Ce territoire produit, tout au long de l’année et au fil des saisons, une grande variété de fruits et légumes qui nous mettent l’eau à la bouche et invitent à la découverte d’une route délectable.
Une telle diversité de paysages appelle une belle diversité de traditions culinaires et de productions agricoles. La Drôme cultive une agriculture largement diversifiée : fruits, notamment des cultures de pêches et d’abricots, vins, plantes à parfum et aromatiques, olives noires, ail, truffe, viandes et fromages… Quant à l’Ardèche, il s’agit de l’un des rares départements français où l’on peut trouver tous les systèmes de production agricole : grandes cultures, polyculture-élevage, cultures et élevages spécialisés. Cela est à la fois dû à la diversité écologique (différents climats, sols, biodiversités) et à la diversité des savoir-faire construits dans l’histoire.
En version salée ou sucrée, voici quelques spécialités triées sur le volet.
Ci-contre : Palengat P., Walch M., Carnet de Voyage dans la Drôme, Curandera, 1989. Marché de Valence, place des Clercs.
Le picodon est un fromage au lait cru de chèvre à pate molle blanche ou jaune, recouvert d’une croûte naturelle fleurie. Il a la forme d’un palet rond de 5 à 7 centimètres de diamètres pour 2 centimètres environ d’épaisseur. Faisant partie des 46 fromages français reconnus Appellation d’Origine Contrôlée, il obtient ce label en 1983 sous l’appellation « Picodon de l’Ardèche et Picodon de la Drôme » avant de devenir AOP en 2009. Aujourd’hui, 140 producteurs produisent plus de 456 tonnes de picodon grâce à quelque 18 000 chèvres. Son aire de production s’étend donc sur toute l’Ardèche et toute la Drôme mais également sur le canton de Barjac dans le Gard et le canton de Valréas dans le Vaucluse faisant ainsi du picodon, un fromage emblématique du sud-est de la France. Pour autant, son origine demeure toujours incertaine voire mystérieuse.
En effet, le nom même du picodon reste aujourd’hui sujet à débat : il pourrait provenir du patois provençal picaoudou, signifiant « petit fromage piquant » ou encore de l’occitan pichot, « petit ». Il apparait dans les sources sous de multiples orthographes comme picaudou, picaïdon ou encore picaudon. Les écrits historiques à son sujet sont relativement rares jusqu’au XIXe siècle notamment parce que le picodon s’ancre dans une tradition rurale, orale et populaire. Nous pouvons néanmoins faire remonter les premières traces écrites de ce fromage au XIVe siècle vers Dieulefit, Valréas ou encore Tournon, sans avoir l’exacte certitude qu’il s’agisse bien du picodon actuel mais assurément d’un fromage de chèvre. Le poète de la Pléiade Pierre de Ronsard en aurait dégusté dans sa jeunesse au château de Tournon au XVIe siècle.
Ci-dessus : Chastan C., Mannent R., Le Picodon, un fromage dans les étoiles. Histoire et histoires d’une passion dans l’Ardèche et dans la Drôme, Syndicat du Picodon, 2003.
Produit par des femmes, réservé à une consommation familiale, le picodon était fabriqué pour être reversé comme redevance en nature de la plupart des baux fermiers. Il permettait aussi en automne et en hiver, lorsque la production laitière des chèvres se faisait plus rare, d’éviter les pertes d’excédents de lait. Sa production apparaît intimement liée à l’histoire de l’élevage caprin où la présence de la chèvre était nécessaire pour assurer la subsistance des familles pauvres dans les montagnes vivaraises ou préalpines. Il faut attendre la fin du XIXe siècle pour que ce fromage prenne un véritable essor commercial notamment grâce au « Petit Train du Picodon » entre Dieulefit et Montélimar. Cette ligne de train relia Dieulefit à Montélimar de 1893 à 1936, facilitant l’importation de charbon et d’engrais mais aussi l’exportation de céramiques, de textiles et marchandises alimentaires comme le picodon dont la vente se répandit sur les marchés locaux de la Drôme. Cette ligne de train fut inaugurée par Emile Loubet, futur Président de la République, qui ne cachait par ailleurs pas son affection pour le picodon. Il ira, entre autres, plaider au Conseil municipal de Paris pour que ce fromage sec trouve sa place aux côtés de fromages frais qui eux ne payaient pas de droits d’entrée dans la capitale.
C’est aussi à cette époque que le picodon fait son entrée dans le dictionnaire Le Littré en 1883 sous la définition suivante : « nom d'un fromage estimé qui se fabrique dans le Drome [sic] » alors qu’il continue d’être loué dans les traditions populaires notamment dans des comptines en occitan ou en français. Enfin, en 1933, le célèbre « prince des gastronomes » Curnonsky lui donne une place de choix dans son Trésor gastronomique de France. Le classement du picodon parmi les fromages AOC, au début des années 1980, vient couronner cette notoriété en apportant à la fois reconnaissance et protection de ce fromage séculaire.
« Cochonnaille la plus célèbre du Dauphiné » (Antoine et Amicie d’Arces), la caillette est un petit pâté rond, d’une dizaine de centimètres de diamètre et d’un poids de 250 grammes environ. L’origine de son nom semble faire consensus : le caïon ou cayou désigne le cochon dans les différents « patois » des deux départements de la Drôme et de l’Ardèche (certains auteurs évoquent cependant une autre piste, celle des jarres d’huile appelées caillères dans lesquelles étaient parfois conservés les pâtés en Ardèche…).
« Lorsque vous avez une caillette dans votre assiette, écrit l’historien René Fonvieille, vous êtes loin de vous douter que cet humble mets a failli provoquer la guerre entre deux belles provinces, le Vivarais et le Dauphiné. Et encore aujourd’hui la hache n’est pas tout à fait enterrée ». Cette querelle est double : si elle porte prioritairement sur la question de savoir sur quelle rive du Rhône se trouve le berceau de ce pâté, elle s’accompagne également de vives conversations sur la manière de préparer le mets et de le consommer. Toutes les caillettes sont faites d’un mélange de foie, de gorge et de tête de porc, d’herbes blanchies (salades, blettes, épinards…) et d’épices. Ce mélange est ensuite coiffé d’une crépine de porc et cuit au four. Si la caillette est souvent plus riche en herbes et consommée chaude en Ardèche, elle est dégustée comme un pâté froid, dans la Drôme, où la recette est généralement plus riche en viande.
Ci-contre : Dossier de membre de « La caillette, société artistique et culinaire » : menus, coupures de presse, dessins…, 1886-1889 (BMV, fonds Marius Villard, ms. 88)
Les distinctions s’opèrent principalement sur la part de viande par rapport aux herbes et aussi sur les ingrédients qui peuvent être ajoutés à la recette principale : plantes sauvages (pissenlit, marjolaine, ortie, sauge…), ail et persil, par exemple. Des caillettes à la châtaigne et au chou sont signalées en Ardèche, alors que Lus-La-Croix-Haute (Drôme) s’honore d’une recette avec champignons et pommes de terre ! « Il est nécessaire de savoir que chaque village possède ses propres recettes qui respectent les grandes lignes de la charcuterie. Bien souvent, d’un quartier ou d’un hameau à l’autre, des différences sensibles peuvent s’observer. Et, sans exagérer, nous pouvons affirmer que chaque famille, chaque arrangeuse, applique ses propres recettes, ajoute des ingrédients et autres qui déterminent des saveurs riches de leur diversité » écrivent Henri et Suzanne Blanc.
La caillette procède en effet d’un savoir-faire traditionnel. Lors des tuades de cochons familiales de jadis, elles étaient confectionnées le jour même afin d’utiliser rapidement des viandes difficiles à conserver. Il était d’ailleurs d’usage de « porter le cochon » (quelques caillettes et une fricassée de boudins) à des proches ou à des voisins, afin d’entretenir la convivialité sans risquer de gâter ces produits périssables. Cuites longuement, les caillettes pouvaient alors se conserver environ deux semaines.
En novembre 1886 est créée à Valence « La Caillette, société artistique et culinaire ». Réunissant des notables républicains locaux, ce cercle de sociabilité organise des « repas pantagruéliques arrosés de vins exquis et agrémentés de causeries rabelaisiennes ». Disparue rapidement (janvier 1889), cette société n’en demeure pas moins l’organisatrice de premiers « concours » de caillettes, dans lesquels - outre les convives - vont se distinguer les restaurateurs locaux et certaines « excellentes cuisinières » de la place de Valence.
Au XXe siècle, la production artisanale de caillettes se développe, s’industrialisant même dans les années 1960. A partir de l’entre-deux-guerres, la ville de Chabeuil, dans la Drôme, revendique le titre de « capitale » de ce mets. Lors de la réception par la mairie de Valence, le 23 février 1935, du critique gastronomique Curnonsky « la caillette de Chabeuil » figure bien au menu, comportant un large florilège des diverses spécialités des deux rives du Rhône, servi à l’Hôtel de Lyon.
En 1967, une confrérie, dite des « Chevaliers du Taste-Caillette », est créée à Chabeuil. Intronisant des personnalités locales et nationales, autant que des acteurs de la gastronomie, elle vise à préserver et mettre en valeur les savoir-faire traditionnels, notamment lors d’une foire dédiée à la caillette, à l’automne.
Présente des portes de l’Isère jusqu’aux frontières de la Haute-Loire et du Royans jusqu’à la Provence (il en existe ainsi dans le Var !), la caillette n’a pourtant pas de provenance géographique précise. Seule son origine populaire est attestée. Fonvieille écrit ainsi que s’il n’a pas trouvé le mot « caillette » dans des documents avant le XIXe siècle, il se dit persuadé que les « pâtés d’assiettes » ou « petits pâtés » qui figurent au menu de repas modestes dans les années 1730-1740 signalent bien notre charcuterie. Cette préparation ancestrale figure désormais sur de nombreuses bonnes tables en Drôme et Ardèche. Elle fait le bonheur d’un pique-nique ou d’un apéritif entre amis à défaut de toujours réconcilier drômois et ardéchois quant à sa préparation !
Ci-dessus : Dossier de membre de « La caillette, société artistique et culinaire » : menus, coupures de presse, dessins…, 1886-1889 (BMV, fonds Marius Villard, ms. 88)
S’il existe un fruit qui caractérise nettement la culture ardéchoise, c’est bien la châtaigne ! Son importance est telle qu’elle dépasse largement le cadre gastronomique à proprement parler : la castanéiculture et ses multiples usages ont façonné les modes de vie des habitants de ce territoire pendant des siècles, formant une véritable « civilisation du châtaignier ».
Cet arbre est en effet parfaitement à son aise sur le terroir de l’Ardèche, où il a été cultivé sur les pentes aménagées en terrasses dès le XIIIe siècle avec l’apparition de la technique du greffage. Son bois imputrescible est idéal pour l’ébénisterie, en plus de servir de bois de chauffe. Ses branches et ses feuilles trouvent aussi leur utilité, pour le fourrage des bêtes, entre autres. Mais l’atout majeur du châtaignier réside bien sûr dans ses fruits, qui sont ramassés au sol au début de l’automne, extraits de leurs bogues, puis épluchés et séchés, par divers procédés manuels et mécaniques.
Pas moins de 65 variétés de la châtaigne européenne (Castanea Sativa) sont présentes en Ardèche. Citons entre autres la « Comballe » et la « Merle » dans la vallée de l’Eyrieux, « l’Aguyane » plus au sud et la « petite Pourette » dans les zones d’altitude… Au fait, parle-t-on de châtaigne ou de marron ? On distingue ces deux catégories selon que le fruit est cloisonné (la bogue contient alors le plus souvent trois châtaignes) ou non (un seul gros fruit). Ce marron-là ne doit pas être confondu avec le fruit non comestible du marronnier d’Inde, arbre d’ornement très présent dans nos villes, mais non apparenté au châtaignier !
Ci-contre : Boucher C., Ardèche, la civilisation du châtaignier, Saint-Remy-de-Provence : éd. Equinoxe, 2015
Jusqu’à la révolution industrielle, là où les céréales se cultivent mal, la châtaigne produite en abondance est une source de nourriture primordiale : fraîche, grillée ou transformée en farine, en soupe, en confiserie, sans oublier le miel de châtaignier… Elle sert aussi de monnaie d’échange contre d’autres denrées alimentaires, ce qui en fait l’un des socles de la prospérité économique de l’Ardèche entre 1750 et 1850 environ. Mais la maladie de l’encre (causée par un champignon parasite) décime les châtaigneraies à partir des années 1860. Puis l’exploitation intensive par l’industrie, utilisant les tanins du bois pour la teinture des cuirs, conduit à une coupe drastique des plantations anciennes. Par la suite une nouvelle épidémie, celle du chancre de l’écorce (endothia), s’est répandue. Ces difficultés successives ont entraîné le déclin vertigineux de la castanéiculture ardéchoise, sur fond de concurrence étrangère (italienne notamment) et d‘exode rural, pendant l’après-guerre et jusqu’aux années 1970.
Dans le même temps, en dépit de ses excellentes qualités gustatives et nutritionnelles, la châtaigne a aussi été victime de préjugés culturels, décriée comme une nourriture « de pauvre » bonne pour les périodes de disette et les contrées arriérées. En effet, sa méthode traditionnelle de récolte, non mécanisable et donc peu rentable, ne correspondait guère aux idéaux productivistes de la « révolution agricole » des Trente Glorieuses …
Mais depuis une cinquantaine d’années, cet argument a été retourné en faveur de l’aspect écologique et patrimonial de la castanéiculture : la culture en terrasses préserve les paysages ardéchois typiques en luttant contre l’érosion des pentes ; le couvert végétal stabilise les conditions climatologiques locales et abrite de nombreuses espèces sauvages et la production ne nécessite aucune utilisation d’intrants chimiques néfastes à l’écosystème.
Peu à peu, la remise en valeur des châtaigneraies abandonnées a permis le retour en grâce de la châtaigne dans la promotion gastronomique et touristique ardéchoise, faisant du département le plus gros producteur français avec 5000 tonnes par an, ce qui représente 50% de la production nationale. Elle a obtenu son AOC en 2009 et son AOP, appellation d’origine protégée, en 2014. De nombreuses festivités célèbrent ce renouveau de la castanéiculture à travers tout le département : les castagnades d’automne se tiennent chaque année dans plusieurs villages, entre le 15 octobre et le 15 novembre.
Ci-contre : La récolte des châtaignes, 2007 [VR, 28 FI 117] © Archives & Patrimoine Valence Romans Agglo
Brioche en forme de couronne à la croute dorée réalisée avec du beurre, de la farine, du sucre, des œufs, de la fleur d’oranger et du ferment, la pogne est une tradition locale, principalement cuisinée dans la région de Romans, mais aussi dans tout le département de la Drôme. Une fois les ingrédients mélangés et pétris, la pâte repose plusieurs heures avant de passer au four. Cette recette de base a connu différentes variantes provenant de touches personnelles de boulangers passionnés, mais une chose est certaine : la brioche doit être ronde avec un trou au milieu.
La pogne viendrait de l’habitude des ménagères de prélever une poignée de pâte à pain et de la mettre en couronne à l’entrée du four pour tester la chaleur du four. Petit à petit, elles améliorèrent cette pâte en y ajoutant du beurre, des œufs et du sucre. La pogne serait la descendante de cette poignée de pâte. Une autre tradition indique qu’un boulanger du nom de Hugues Pognet en 1590 aurait fabriqué une brioche, « une pogne ». Les linguistes nous donnent une autre version. L’étymologie du mot pogne viendrait du latin spongia devenu espogne utilisé pour désigner un pain spongieux, moelleux.
La pogne existe au moins depuis le XVIe siècle, nous trouvons son évocation dans deux textes officiels de cette période : un document sur le bail du four de Saint-Marcellin et dans les délibérations consulaires de Romans où lors de disette de blé il est interdit d’utiliser la farine pour réaliser « plus de fouasses, de gâteaux, ni de pognes… ». Jusqu’au XIXe siècle, la pogne est un aliment de luxe car elle contient du beurre et du sucre, denrées peu courantes à l’époque. Elle se consomme principalement durant le traditionnel repas de Pâques pour fêter la fin du carême. La pogne est également présente lors des grandes fêtes familiales. Cette recette de brioche traditionnelle est enrichie de zestes d'orange. Si le climat dauphinois ne permet pas la culture de ce fruit, il est possible d'utiliser des fleurs macérées dont l'extrait est utilisé pour parfumer les préparations culinaires.
Avec l’arrivée du chemin de fer à Romans en 1864, la pogne connaît une véritable expansion. Elle est expédiée par les boulangers toute l’année et dans toute la région (de Lyon à Marseille, puis Toulon, Nice…) sous le nom de « Pogne de Romans ». Au XXe siècle la pogne devient un produit commercial dont la production peut être industrialisée.
En 1988 un syndicat de Défense et de Promotion de la Pogne de Romans est créé dont l’objectif premier est l’obtention d’une appellation d’origine contrôlée « Pogne de Romans ». Ce syndicat perdure jusqu’en 2002. Il est remplacé par une nouvelle association, fondée à l’initiative d’artisans boulangers, « La noble confrérie de la pogne de Romans ». A la même période, une autre spécialité locale est à l’honneur, la raviole. « La fête de la pogne et de la raviole » devient alors un rendez-vous annuel.
Ci-contre : Insigne de confrérie [VR 88 S 1] © Archives & Patrimoine Valence Romans Agglo
La « raviole » est une spécialité culinaire propre à la région du Dauphiné, du Royans et du pays de Romans. Sa recette fait aujourd’hui consensus : elle est composée d’une pâte de farine de blé tendre, d’œuf et d’eau qui entoure une farce à base de comté, de fromage blanc et de persil. Les deux feuilles de pâte sont laminées finement puis assemblées autour de la farce malaxée.
La raviole trouve ses origines dans la cuisine de l’antiquité romaine, dans la cuisson par friture. Un hachis était préparé en boulettes, appelé « russeolus », dérivé latin du verbe « rossoler » qui signifie « faire frire ». Au XIVe siècle, la « rissole » est décrite comme « un petit carré frit renfermant des morceaux de viande, de poisson ou des légumes hachés menu et liés avec un velouté, cuite à grande friture ». La rissole devient progressivement, par glissement sémantique, la « raviole ».
Aux XVIe et XVIIe siècle, la raviole est attestée dans des provinces bien délimitées : en Wallonie, en pays niçois, en Provence, en Savoie, dans le Lyonnais, mais c’est en Dauphiné qu’elle est préparée avec « du fromage râpé, fromage mou ou de la recuite mêlés avec du persil et des œufs hachés ». Au XIXe siècle, la raviole subsiste dans les cuisines dauphinoises notamment dans le Royans et dans le pays romanais, et en région savoyarde et provençale avec cependant de nombreuses variantes d’une localité à une autre.
Sa fabrication qui était jusque-là familiale est progressivement abandonnée aux « ravioleuses », des professionnelles de la raviole, qui se déplacent de maison en maison, de ferme en ferme dans le Royans et le nord de la Drôme. En 1885, l’une d’entre elles, Marie-Louise Gélibert, dit « la mère Maury », s’installe à Romans et ouvre le café des Allées, qu’elle rebaptise en 1901 « Café de la banque ». Elle tient commerce jusque dans les années 1915 avant que ses descendants reprennent le flambeau en 1947.
A la fin du XIXe siècle se répand l’idée d’une origine italienne des ravioles : le Vercors abritait des « charbonniers italiens » qui, faute de viande, remplacèrent la farce de leurs raviolis par du fromage. Cette version s’imposa rapidement, sans que sa véracité historique ne soit pour autant attestée.
Après la Première Guerre mondiale, la consommation de ravioles décroit fortement. Dans les années 1930, Emile Truchet, alors jeune apprenti dans un café restaurant place Jacquemart à Romans, conçoit une nouvelle machine pour produire de façon mécanique des ravioles, permettant ainsi de centupler la production sans en altérer la qualité.
Ci-contre : Portrait : Marie-Louise Maury, s.d. [VR, 30 Fi 61]© Archives & Patrimoine Valence Romans Agglo
Pour autant, il faut attendre les années 1960 pour que la raviole constitue un produit « exportable » et se propage plus largement. Dans le courant des années 2000, sa production passe au stade industriel entrainant une large diffusion dans nos rayons de grandes surfaces. Cette facilité d’accès a permis de doubler son volume de production entre 2005 et 2020 passant à un rendement de 2 500 tonnes à plus de 5000 tonnes par an.
En 1989, la cour d'appel de Grenoble reconnaît la spécificité régionale de sa préparation en lui attribuant la dénomination de « Raviole du Dauphiné ». Bénéficiant d'un Label rouge depuis 1998 et protégée par un label IGP depuis 2009, sa fabrication répond aujourd’hui à un cahier des charges très rigoureux. Devenue un produit de consommation (presque) courant, elle se déguste de mille et une façons ... en version salée ou sucrée !
Illustration de la page de titre : Emeriaud Luce, Roc Marie-Paule, La bonne cuisine dauphinoise, Grenoble : Glénat, 2016, 96 p.
Le picodon :
CHASTAN Claire, Le Picodon, un fromage dans les étoiles : Histoire et histoires d'une passion dans l'Ardèche et la Drôme, Syndicat du Picodon, 2003, 199 p.
Le picodon, Die : Éditions A Die, 1998, 108 p.
La caillette :
ARCES (d’) Antoine, VALLENTIN DU CHEYLARD Amicie, « Caillette », Cuisine du Dauphiné : Drôme, Hautes-Alpes, Isère. De A à Z, Paris : Bonneton, 1997, 159 p.
BLANC Henri et Suzanne, Le cochon, un seigneur dans nos campagnes : des recettes de charcuterie, des histoires de et sur le cochon, Aubenas : Impr. Lienhart, 2002, 134 p.
FONVIEILLE René, La cuisine dauphinoise à travers les siècles, Grenoble : Terre et Mer, 1983, 307, pp. 232-234.
FRICHE Annie, « La caille et la caillette », Etudes drômoises, n°40, septembre 2009, pp. 40-41.
Saveurs du Royans. Un clin d'œil aux saveurs du Royans gourmandes et patoisantes, Saint-Jean-en-Royans : Bibliothèque municipale, 2003, 91 p.
« La caillette, drômoise ou ardéchoise ? », L’Agriculture drômoise, hebdomadaire d’information générale et rurale, 19 novembre 2016.
La châtaigne :
BERNARD Jean, Désaignes. La châtaigne,Désaignes : Syndicat d'initiative, 1994, 15 p.
BOUCHER Christian, La civilisation du châtaignier, Saint-Rémy-de-Provence : Équinoxe, 2006, 103 p.
BRUNETON-GOVERNATORI Ariane, Le Pain de bois, Toulouse : Éché, 1984, 533 p.
DUPRE Lucie, La Châtaigne d'Ardèche. Un fruit de l'histoire, Veurey (Isère) : le Dauphiné, 2008, 51 p.
La pogne :
BOUVIER Jean-Claude, « De la pogne aux fermailles : quelques noms de mets sucrés dans les parlers occitans de la Drôme » in Revue drômoise, juin 2014, p.5-14
FRICHE Annie, « La pogne » in Revue drômoise, juin 2014, p.15-17
GOUGEON Béatrice, La pogne, Die : Editions A Die, 1994, 108p.
GOUGEON Béatrice, La pogne : essai sur une spécialité locale, mémoire de DEA : université de Lyon II, 1992, 90p.
JACQUOT Laurent, « Les romanais et la pogne : les origines d’une spécialité régionale (1800-1940) » in Etudes drômoises, mars 2001, p. 33-39
POURTIER Marc, La pogne de Romans : étude historique, technique et socioéconomique dans le cadre d’une démarche d’obtention d’une appellation d’origine, mémoire de maîtrise : université de Grenoble, 1992, 174p.
La raviole :
JACQUOT Laurent, « Pour écrire l’histoire de la Raviole du Dauphiné », in Etudes drômoises, 1996, pp. 41 à 45
PFLIEGER Frédéric, La raviole. De la légende à l’assiette, Valence : Editions & Régions, 2007, 119 p.
« La reconquête de la châtaigneraie », Parc naturel régional des Monts d’Ardèche, [en ligne]. [consulté en avril 2025] https://www.parc-monts-ardeche.fr/les-actions-du-parc/agriculture/reconquete-de-la-chataigneraie/la-reconquete-de-la-chataigneraie/
« L’histoire », Châtaignes d’Ardèche, [en ligne]. [consulté en avril 2025] https://www.chataigne-ardeche.com/filiere-chataigne/
« Castagnades des Monts d’Ardèche », Parc naturel régional des Monts d’Ardèche, [en ligne]. [consulté en avril 2025] https://www.castagnades.fr/
Châtaigner millénaire de l’Hermet à Désaignes [en ligne]. [consulté en avril 2025] https://www.instagram.com/leadugreen/reel/DEfuGIkxCi6/